Mythes et légendes,  Religions et Croyances

À la découverte de la mythologie celtique

La Morrigan, source.

À peu près tout le monde est capable de citer le nom d’un dieu ou d’une déesse du panthéon grec, une grande majorité d’entre nous a déjà entendu parler du mythe d’Osiris, la culture populaire s’est chargée de propager la religion nordique, mais qu’en est-il des croyances celtiques ?

Suivez-moi dans une épopée passionnante, à travers l’Europe occidentale…

Une ou des mythologies celtiques ?

Comme je l’évoquais dans l’article consacré à l’Histoire des cimetières, il est courant de parler du peuple celte mais il s’agit en fait d’un abus de langage. En effet, les Celtes n’ont jamais représenté un peuple uni, que ce soit d’un point de vue linguistique, politique ou culturel. Il s’agit plutôt d’une myriade de tribus, ayant migré de l’Asie vers la Russie en – 2 500, avant de pousser jusqu’à l’Europe occidentale à partir de – 1000.

Mais alors, est-il correct de parler d’une mythologie celtique ou devrait-on l’évoquer au pluriel, en considérant que chaque tribu avait son propre système de croyances ?

La question est épineuse. Pour se faire une idée du problème, prenons l’exemple de la langue. Existait-il une langue celtique, comprise par toutes les tribus ? Eh bien, oui et non. Les langues celtiques dérivent toutes de l’indo-européen, c’est un fait. Sauf que, des distinctions régionales sont apparues, donnant naissance au celtique insulaire et au celtique continental. Par la suite, de nombreuses sous-familles ont émergé, comme le gaulois, le celtibère, les langues brittoniques, les langues gaéliques, etc.

Illustration des langues celtiques, source.

Sachant cela, peut-on dire que les tribus celtes parlaient une même langue ou serait-il plus approprié de parler de langues celtiques ? En vérité, c’est une affaire de point de vue. Vous pouvez très bien dire, qu’après tout, toutes les tribus parlaient une langue dérivée d’une même mutation de l’indo-européen. D’un autre côté, vous pouvez aussi défendre l’idée que les tribus ont développé des particularismes linguistiques et qu’elles parlaient donc des langues différentes.

Tout ça pour dire qu’il en va de même en ce qui concerne le système de croyances. Tous les peuples celtes ont été influencés par un terreau commun, ce qui explique certaines équivalences entre des légendes issues de tribus différentes ou le rôle des druides, aussi primordial d’un côté que de l’autre de la Manche. Toutefois, l’éloignement géographique, la rencontre avec d’autres civilisations, les évolutions politiques ont aussi joué un rôle et permis l’émergence de particularismes, ce qui a notamment entraîné l’essor de divinités locales : la déesse Morrigan en Irlande, le dieu Cernunnos en Gaule, le dieu-magicien Gwydion au Pays de Galles, etc.

Cernunnos sur le chaudron de Gundestrup.

Mais alors, que faut-il en conclure ? J’ai envie de dire, peu importe la formule utilisée, tant que l’on explicite un peu les termes. Et puis, quand on y réfléchit bien, toutes les mythologies du monde ne partagent-elles pas la même dichotomie ? Par exemple, est-il correct de parler d’une religion égyptienne, qui serait restée la même durant ses 3 500 ans d’existence, ou ne serait-il pas plus exact de parler d’une religion primordiale, qui aurait évolué avec le temps et selon l’espace géographique concerné ?

Finalement, ce qui distingue vraiment la mythologie celtique des autres, c’est la rareté des sources disponibles. Il faut dire que ceux qui détenaient le savoir, les druides, transmettaient leurs connaissances uniquement à l’oral. Or, vous le savez, une culture écrite a beaucoup plus de chances de perdurer dans le temps. Du coup, à l’heure actuelle, nos sources principales sur la mythologie celte sont très réduites. On ne peut compter que sur les vestiges archéologiques, les écrits de civilisations contemporaines (surtout les Romains) et la littérature médiévale, bien que celle-ci soit plus tardive et imprégnée de références chrétiennes.

Le dieu gaulois Taranis, sur le Chaudron de Gundestrup.

Les Celtes et la création du monde

Les peuples celtes, comme les Égyptiens, les Grecs, les Aborigènes d’Australie et bien d’autres encore, ont imaginé la création du monde, à l’aide de grands récits fondateurs. Toutefois, comme ces récits étaient transmis oralement, peu d’informations sont parvenues jusqu’à nous. On doit donc se contenter de bribes, éparpillées ci-et-là, dans des ouvrages écrits à des époques différentes et par des individus ayant d’autres croyances.

Malgré tout, en comparant les sources et en les confrontant à l’archéologie, on a pu dégager des grands principes et des morceaux de récits, qui nous aident à mieux appréhender la cosmogonie celte.

Déjà, les Celtes n’avaient pas une vision linéaire de la création du monde, c’est-à-dire qu’ils croyaient en un monde en perpétuel renouveau, se reconstruisant sans cesse. Chaque création s’obtenait en domptant le chaos, ce qui s’accompagnait de l’apparition d’une entité primordiale, qui à son tour engendrait une divinité première, à l’origine des êtres vivants.

Ce schéma narratif se retrouve dans le mythe de création du monde le plus complet de la tradition celte : le mythe d’Eiocha.

Eiocha et le chêne.

Ce récit fondateur nous dit qu’au départ, il n’y avait ni temps, ni espace, ni personne, sauf la terre et la mer. Puis, la mer et la terre se sont unies, donnant naissance à une jument blanche, de la couleur de l’écume de la mer. Cette jument avait pour nom Eiocha. Sautant de la mer jusqu’à la terre, Eiocha a trouvé un chêne, dont elle a mangé la graine, elle aussi faite de l’écume de la mer.

La graine s’est transformée en un enfant et Eiocha a donné naissance au premier dieu du monde : Cernunnos. Pendant son accouchement, de douleur, Eiocha a arraché un morceau d’écorce de chêne, qui a atterri dans l’eau. Sont alors nés les Fomoires, des créatures marines qui vont jalonner l’histoire mythique irlandaise.

Mais, bien vite, Cernunnos a commencé à s’ennuyer, il ne voulait pas être fils unique. Alors, aidé de sa mère, il va créer 4 nouvelles divinités : Maponos, le dieu de la jeunesse, Taranis, le dieu du tonnerre, Toutatis, le dieu protecteur, et Épona, la déesse de la fertilité. Ensemble, ils vont s’assurer de préserver le monde, en tenant éloigné le chaos.

La déesse Épona, source.

Le temps passe et les divinités deviennent adultes. Eiocha, elle, se lasse de la vie terrestre. Laissant les commandes de la terre à son fils Cernunnos, elle plonge dans la mer et devient Tethra, la déesse des profondeurs.

Eiocha partie, les dieux vont vouloir créer des êtres qui puissent les reconnaître et les adorer comme leurs créateurs. À l’aide de l’écorce du chêne, ils vont donner naissance à la première femme et au premier homme. Cernunnos décide ensuite de créer les animaux : il va ainsi façonner des cerfs, des sangliers, des serpents, des chiens, et faire grandir le chêne, pour qu’ils puissent avoir un abri. En souvenir d’Eiocha, Épona va modeler les chevaux. Toutatis, dieu protecteur, façonne des arcs et des flèches, tandis que Taranis crée la foudre. Quant à Maponos, il fabrique une harpe, dont le tintement des cordes fait jaillir le vent.

Dana/Danu, la déesse mère des Tuatha Dé Danann.

Ce joli récit est le plus complet des mythes fondateurs celtes qui nous soient parvenus, mais il est loin d’être le seul à avoir existé. Plusieurs autres traditions ont été racontées, qu’elles soient liées à la déesse irlandaise Dana (ou Danu), au chef irlandais Partholon, ou à des entités plus vagues, comme ce Premier Dieu, qui aurait crée le monde grâce à son souffle.

Quelques légendes celtes…

La mythologie celte regorge de nombreuses légendes, traitant de divinités, de héros et de créatures fantastiques. Pour vous en donner un petit aperçu, laissez-moi vous raconter trois d’entre d’elles…

Parlons d’abord de Balor. Dans la mythologie irlandaise, Balor est le roi des Fomoires, êtres associés au chaos et à la destruction. La légende raconte que, petit, Balor se serait approché du chaudron d’un druide et que son unique œil aurait été frappé d’un sortilège. Désormais, quiconque le regarderait dans l’œil (il faut imaginer les Fomoires comme des sortes de Cyclopes) mourrait.

Illustration de Balor, source.

Devenu adulte, Balor a appris à tirer avantage de son œil ensorcelé pour remporter de nombreuses batailles, décimant des armées entières à lui tout seul. Imaginez un peu, pour soulever son énorme paupière, il fallait pas moins de 4 hommes ! Mais le bonheur de Balor va être de courte durée. Bientôt, il apprend qu’une prophétie a prédit qu’il sera tué par son petit-fils.

Pour empêcher la réalisation de ce funeste présage, Balor décide de faire enfermer sa fille Eithne dans une tour de cristal. La pauvre n’a aucune chance de s’échapper : 12 femmes la gardent jour et nuit.

Pourtant, un beau jour, pour se venger du vol de sa vache Glas Gavlen, une énorme bête capable de nourrir tout un village, le forgeron Cian, de la tribu de Tuatha dé Danann, parvient à s’introduire dans la tour où réside la fille du voleur. Neuf mois plus tard, Eithne donne naissance à 3 enfants.

Ayant appris la nouvelle, Balor est fou de rage et décide de noyer les enfants. Mais, ce qu’il ne sait pas, c’est que l’un des petits a survécu. Des années plus tard, Balor participe à une bataille et fait la rencontre d’un ennemi redoutable, un certain Lugh Lamfhota. Grâce à son lance-pierre, Lugh tue Balor, qui est en fait son grand-père. La prophétie a fini par se réaliser…

Changeons de région géographique, pour partir à la rencontre d’une figure centrale de la mythologie galloise : le barde Taliesin.

Comme l’histoire de Taliesin est très riche, nous n’allons aborder qu’une petite partie du mythe, que je pourrais compléter dans un autre article, si son histoire vous intéresse. Il suffira de me le demander dans les commentaires. 😊

Déjà, il faut faire attention à ne pas confondre le mythe et la réalité, puisqu’il a existé un barde nommé Taliesin. Ayant vécu au VIème siècle, Taliesin a été au service de plusieurs rois, dont il a chanté les louanges. Considéré comme l’un des plus grands poètes de son temps, il a même été associé à la légende arthurienne.

Mais, celui qui nous intéresse dans cet article, c’est le barde mythique du même nom. La légende prend place au pays de Galles et nous raconte qu’avant de devenir le barde Taliesin, l’homme s’appelait Gwion Bach et qu’il était au service de la sorcière Ceridwen.

Illustration de Ceridwen.

Ceridwen avait un fils nommé Morvran, que tous détestaient, et une fille appelée Creirwy, que tous adoraient. Pour faire accepter son fils auprès des autres, Ceridwen décida de fabriquer une potion complexe, qui donnerait à Morvran le don de prophétie. Pendant une longue année, la potion bouillit. Une fois prête, elle devait produire 3 gouttes, qui donneraient la connaissance du passé, du présent et du futur à qui les toucherait, tandis que le reste de la potion deviendrait du poison.

C’était Gwion Bach qui était chargé de s’occuper du feu sous le chaudron. La potion terminée, Ceridwen appela son fils, pour qu’il se place à côté du chaudron. Mais, on ne sait trop comment, les 3 gouttes atterrissèrent sur la main de Gwion Bach, qui obtint aussitôt le don d’omniscience. Sachant que la sorcière allait chercher à le tuer, Gwion Bach prit la fuite.

Illustration du mythe de Gwion Bach et Ceridwen.

Pour semer Ceridwen, Gwion Bach se métamorphosa, d’abord en lièvre, puis en poisson, avant de devenir un oiseau. Mais la sorcière avait plus d’un tour dans son sac : à chaque transformation, elle prenait la forme d’un prédateur. Parvenu dans une grange, Gwion Bach décida de devenir un grain de blé. Alors, Ceridwen se changea en poule et avala le grain.

L’histoire aurait pu s’arrêter là mais, le grain avalé par Ceridwen se transforma en un enfant, auquel elle donna naissance. Tout en sachant qu’il s’agissait là de Gwion Bach, la sorcière n’eut pas le cœur de se débarrasser de son vieil ennemi. Alors, plutôt que de le tuer, elle le déposa dans une petite embarcation et l’abandonna sur la mer.

On va s’arrêter là pour l’instant mais, si vous aimeriez connaître la suite des aventures de Taliesin, n’hésitez pas à m’en faire part et je vous les raconterais dans un autre article… 😊

Pour conclure ce petit panorama des légendes celtiques en beauté, partons en Écosse, où réside une étrange créature : le Cat Sìth

Il se raconte, qu’au sein des Highlands, vit une mystérieuse créature. Celle-ci ressemble à un grand chat noir, avec une marque blanche sur le poitrail. On l’appelle le Cat Sìth, le Chat-Fée. La plupart du temps, le Cat Sìth se promène parmi les humains à quatre pattes, comme un chat ordinaire. Mais, dès qu’on lui tourne le dos, il se dresserait sur ses deux pattes arrières, comme si c’était là sa véritable apparence.

Apparition fantôme, créature féérique, sorcière transformée (mais bloquée dans le corps d’un chat), personne ne sait vraiment ce qu’est le Cat Sìth. Pourtant, on le redoute. On dit qu’il se nourrit des âmes des personnes attendant d’être enterrées. Alors, on tente de l’éloigner, en lui proposant des distractions, que ce soit des jeux, des énigmes ou de l’herbe à chat. On a également pris l’habitude de placer les défunts dans des chambres froides, pour que le froid empêche le Cat Sìth d’approcher.

Illustration du Cat Sìth.

Mais l’énigmatique félin sait se montrer patient. La nuit tombée, il s’en va rôder autour des chambres funéraires et des cimetières, à la recherche d’une âme sans protection. Alors, pour l’empêcher de voler l’âme des disparus, on a fini par organiser des Fèill Fhadalach, des veillées funèbres. Ainsi, jour et nuit, les corps des parents morts peuvent être surveillés.

Il se dit que le Cat Sìth serait aussi à l’origine d’une autre tradition, cette fois-ci liée à la fête de Samhain. Marquant le début de l’hiver, Samhain symbolise une rupture, entre la période claire et la période sombre de l’année. Ce soir-là, les habitants auraient pris l’habitude de laisser un verre de lait à l’extérieur de leur maison. Ce faisant, ils s’assuraient la protection du Cat Sìth. Ceux qui ne laissaient pas de lait à Cat Sìth étaient quant à eux maudits et promis à une année de famine.

Si cet article vous a plu, n’hésitez pas à me laisser un petit commentaire ! 👍

J’aimerais également savoir si vous connaissiez déjà certains aspects de la mythologie celtique ? Ou si votre seule référence était Astérix ? Je plaisante mais c’est quand même l’une des rares œuvres à aborder la mythologie celte alors respect !

Personnellement, j’ai adoré écrire sur le sujet, j’ai même plusieurs idées d’articles et de podcasts en tête… dont un article qui traiterait de la Morrigan

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Merci d’avance et à bientôt, pour une nouvelle Histoire de l’Ombre… ❤

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